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L'ART ET LA CULTURE POUR TOUS
11 janvier 2011

Abderrahmane Zenati: LE VENT DE L'EST S'ARRÊTE A FIGUIG

LE VENT DE L'EST S'ARRÊTE A FIGUIG

 

"Extrait"

 

 

J’avais treize ans. Un soir d’hiver, il faisait froid et il était sept heures trente, lorsque je rentrai de l’école retrouvant la douceur de la grande maison que nous habitions dans le beau quartier du Maârif à Casablanca. En cette saison, la nuit tombait avant cinq heures et demie. Je portais une minijupe noire, des collants orange, une veste en cuir, des baskets, un képi rigide, de toile, à fond plat, munie d'une visière. Sur mon baladeur, j’écoutais «le Téléphone pleure » de Claude François.

 Il faisait bon. Le monde me paraissait un endroit délicieux dont la quiétude était troublée seulement par les devoirs que j’avais à faire le soir.

J’ai trouvé ma mère, ma grand-mère, Mami-Fanna, mon grand-père, Papi-Jelloul , l’oncle Moulay Slimane, Tonton El Bachir et Tata Zohra, déjà à table.

Mes parents dînaient tôt.

 La pièce était assez grande et pas mal meublée.

Ma mère me foudroya du regard et hurla :

— Où étais-tu «petite canaille » jusqu’à cette heure-ci ?

Je fais la sourde oreille.

— Akh, Tfou ! ... On dirait une vulgaire abrutie élevée dans les bas quartiers d’Oujda…

Sans faire attention à elle et à ses grimaces rageuses, j’ai embrassé Mami-Fanna sur la joue et Papi-Jelloul sur la main.

— Akh, Tfou ! … Elle est comme ces gens de là-bas ! … Tous féroces, cruels, sauvages et sadiques » …

Il faut avouer que ces paroles de ma mère, indignes d’une maman qui se respecte, m’enrageaient.

— Tu as tardé, ma chérie ! Me dit Mami-Fanna avec tendresse. Nous commencions à nous inquiéter.

— J’ai été chez une copine, lui expliquais-je laconiquement, tout en posant mon lourd cartable sur le divan.

— Dépêche-toi, Sophia, dit-elle. Mets-toi vite à table. Le dîner va être froid.

— Tout de suite, Mamie, lui dis-je en me savonnant les mains au lavabo de la salle de bain.

C’est alors que ma mère, de nouveau, me lança un regard hostile et hurla, la bouche pleine :

— Ne répands pas l’eau par terre, comme une petite sauvage ! ...

— Je l’essuierai, dis-je d’un ton sec, sans la regarder.

— Mais, non, bougonna Mami-Fanna. Ce n’est pas ton rôle, Sophia. La bonne va le faire tout à l’heure…. Viens vite manger, petite chérie...

Ma mère regarda Mami-Fanna et révéla sa contrariété en fronçant les sourcils.

— Bon ! … Alors je ne l’essuierai pas, Mamie, dis-je en chantonnant et en regardant ma mère de biais avec défi.

Le visage déformé de colère, grogna :

 — C’est ça ! … Ton rôle n’est pas d’être un peu utile à la maison… petite traînée, va… Tout comme ton salaud de père, tu ne fais que vagabonder avec tes petits copains dans ces habits ridicules… Akh, Tfou ! … Ce qu’elle peu ressembler à son crétin de père ! … Ils me martyrisent l’esprit et me font souffrir.

Agacé par ses remarques pertinentes, je haussais les épaules et m’installais près de papi-jelloul.

 Papi-Jelloul et Mami-Fanna, avaient fui la misère de Figuig dans les années cinquante et trouvaient refuge à Oujda, puis de là, à Casablanca. En quelques années seulement, Papi-Jelloul avait fait fortune.

 

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  • Parler de mes émotions face à ce monde perturbé où chaque jour un drame se joue quelque part... D'écrire ma vie à Oujda et à Saïdia où je passe mon temps entre mes pinceaux et ma plume... Parler de ma peinture et de mon écriture teintées de mes états d'âme
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