Abderrahmane Zenati: Conférence à la bibliothèque de l'institut français à Oujda
Parmi les écrivains qui ont vécus dans cette ville et qui furent inspirés par sa nature, sa tranquillité, son ambiance et son charme, je commence par l’Algérien Mohamed Dib qui a écrit, entre autres, La Grande Maison, L'Incendie, Le Métier à tisser… Ce sont des magnifiques livres cultes pour comprendre l’enfance déchirée des petits maghrébins et la lente prise de conscience politique du peuple algérien devant la colonisation.
Mohammed Dib qui a vécu très longtemps à Oujda est né à Tlemcen dans une famille ruinée. Il avait commencé ses études dans cette capitale de la culture algérienne et les a continuer à Oujda. Une partie de sa famille, proche ou lointaine, réside toujours dans notre ville.
Lorsque je l’ai connu, je n’étais qu’un enfant et je ne savais pas vraiment qui il était et ce qu’il allait devenir. Lui aussi, certainement.
Je connaissais le docteur Abrous, un pharmacien bien connu à Oujda. Sa pharmacie est toujours à la rue Marrakech.
Abrous, homme cultivé et très porté sur l’art, m’aidait et m’encourager dans ma vocation. Et c’était chez Abrous que j’avais vu le futur écrivain qui était un grand ami du pharmacien.
Mohamed Dib était membre de l'amicale des Algériens à Oujda et il fréquentait le cercle très fermé des Français . C'étais là qu'il avait lié des amitiés avec plusieurs personnes, entre autres, Albert Bou, artiste peintre et chef de service à la municipalité. Ce dernier avait peint des centaines de paysages d’Oujda et de Saïdia. Il était très côté dans notre ville et il vendait ses tableaux très chers.
Après la mort de son père, Mohamed Dib avait commencé, à écrire des poèmes d'amour et à peindre des paysages de la ville, tout en s’inspirant des styles des artistes locaux qu’étaient monsieur Ayache, Albert Bou, Albert Matherat, Madame Leprince, Mademoiselle Paco et bien d’autres encore.
A cette époque, le seul peintre que je connaissais, était le père des frères Maigri, ces chanteurs qui ont révolutionnés la musique maghrébine.
Il n’y avait aucun peintre marocain à ma connaissance. Mohamed Dib publiait ses poèmes et signait ses peintures sous le nom de Diabi et d’autrefois Tiabi. Mais la poésie et la peinture ne le faisaient pas gagner sa vie.
Pour survivre, Mohamed Dib est devenu instituteur occasionnel à Zoudj Bghel, petite bourgade algérienne près de la frontière marocaine. Juste après, notre future écrivain célèbre se trouva une place comme comptable à Oujda, au service des Subsistances de l'Armée française. C’était au camp Roze qui était autrefois un lieu propre et admirable entouré de roses, de bougainvilliers et d’hibiscus.
C’est la rencontre de Mohamed Dib l’instituteur français, Roger Bellissant (qui deviendra son beau-père) qui le conforta dans la voie de l'écriture.